La Chine ambitionne de devenir le premier vignoble au monde d’ici cinq ans
Qui aurait osé un tel pronostic, il n’y a pas si longtemps de cela, lorsque la Chine mélangeait encore grand crus et sodas? La République populaire s’est muée en quelques années à la fois en eldorado et en superpuissance du vin.
La soif de vin rouge des Chinois semble ne pas connaître de limites, alors que la consommation de blancs et de pétillants progresse aussi.
Détrônant au passage la France, la Chine est devenue le premier pays au monde consommateur de vin rouge,selon l’étude de conjoncture Vinexpo. Entre 2007 et 2013, sa consommation a été multipliée par 2,75 (+175,4%) alors qu’au cours de la même période elle diminuait de 5,8% en Italie et de 18% en France. Et cette soif de vin n’est pas prête d’être étanché.
Les vins français dominent le marché chinois
La classe moyenne chinoise et ses 400 millions d’individus est de plus en plus attirée par les produits de consommations occidentaux au fur et à mesure que les salaires et le niveau de vie progressent. «Le marché du vin en Chine possède un grand potentiel et c’est une chance pour la France, souligne Wu Jianmin, ancien ambassadeur de Chine à Paris. Lorsque les Chinois ont commencé à consommer du vin français, c’était un produit de luxe. Mais il est désormais à la portée des portes monnaie de la classe moyenne».
Les vins français dominent toujours le marché chinois avec une part de marché de près de 50%, loin devant l’Australie et l’Espagne. La République populaire reste notamment le premier importateur de Bordeaux. «En Chine, le vin, qui est très cher, est consommé surtout par une classe urbaine, estime Boris Petric, anthropologue au CNRS. Il est le symbole de l’accès au luxe et est associé à la France. La culture du cadeau est très importante en Chine et le vin finit parfois dans une vitrine, il ne faut donc pas confondre consommation et vente. Mais il existe une petite tranche d’amateurs et les bars à vins se développent».
Les étudiants chinois étudient l’œnologie en France
Les investisseurs chinois continuent de s’intéresser de près aux domaines français, non seulement dans le Bordelais, mais aussi en Bourgogne, dans la Loire ou dans le Languedoc-Roussillon. Et les étudiants chinois en œnologie continuent de se ruer vers les écoles françaises. Cependant, bien qu’ils se taillent toujours la part du lion en Chine, les vins français marquent le pas au profit des domaines européens, notamment en Espagne et en Italie.
La Chine est aussi devenue en quelques années le cinquième producteur de vins au monde derrière l’Italie, la France, les États-Unis et l’Espagne. Plus de 80% des vins consommés en Chine sont élaborés sur place. Attirés par le potentiel du marché du vin chinois, les groupes français investissent en République populaire. Le gouvernement chinois favorise notamment les investissements visant à développer les zones pauvres ou semi-désertiques grâce à la viticulture, comme le Ningxia nouvel eldorado du vin chinois ou le Xinjiang. Les Chinois vont devenir un acteur-clé de l’économie viticole. Ils ont décidé d’être un grand producteur et seront, en superficie et en volume, le premier vignoble au monde d’ici cinq ans.
Pékin a ouvert une enquête
Cela ne va pas sans provoquer de heurts avec les partenaires européens de la Chine. Ainsi, Pékin a ouvert une enquête en juillet, afin de déterminer si l’UE subventionne ses exportations de vin vers la Chine, créant de ce fait une distorsion de concurrence. L’initiative a été interprétée comme une mesure de représailles à la décision qu’avait prise Bruxelles d’imposer des droits de douane punitifs sur les panneaux solaires fabriqués en Chine… Mais elle sont aussi le signe des nouvelles ambitions viticoles de la République rouge.
Source: Patrick Saint-Paul
LeFigaro.fr
29 janvier 2014