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La Bergere dans la Presse – Le vin, un placement à laisser vieillir

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Caves « clés en main » ou fonds spécialisés : l’investissement vinicole n’est pas sans risques et doit se concevoir dans la durée.

 Alors que les amateurs profitent des foires aux vins pour traquer la bonne affaire, certains d’entre eux se demandent si le nectar de Bacchus peut constituer un bon investissement financier. Dans ce domaine comme en Bourse, l’ivresse des sommets peut s’avérer dangereuse. Ces derniers mois, les problèmes de Nobles Crus, un fonds luxembourgeois incapable de faire face à une vague de demandes de rachats, et la liquidation du Vintage Wine Fund ont douché l’enthousiasme des amateurs d’investissement vinique. D’autant plus qu’après avoir été boostés par les nouveaux riches chinois, les vins de Bordeaux enregistrent une baisse des prix. Sur deux ans, l’indice Liv-ex des 100 crus les plus renommés, qui sert de référence aux échanges entre quelque 500 professionnels dans le monde, affiche une baisse de 25%.

 
Profiter de la baisse actuelle

Faut-il pour autant renoncer à jouer la carte du placement vin ? A l’évidence, non. La baisse des cours, en particulier des bordeaux, peut constituer un bon point d’entrée. Mais attention ! Cave personnelle, cave clés en main ou fonds d’investissement spécialisé : quelle que soit la formule retenue, le vin reste un produit à risque. De même, l’achat en primeur d’un premier grand cru de Bordeaux nécessite du temps pour être rentable. Et il ne l’est pas toujours ! Aujourd’hui, par exemple, une bouteille de Château Margaux 2009 est cotée 790 euros, alors qu’elle a été mise sur le marché à 1012 euros TTC, prix auquel un particulier paie aujourd’hui la bouteille.

 

 


 TEMOIGNAGE

Patrick Noël, 49 ans, consultant dans les télécoms

« Ma cave clés en main se valorise de plus de 10 % par an »

pic1Ma passion pour le vin a été tardive. Un peu avant l’âge de 40 ans, j’ai commencé à me constituer une cave. Mais celle-ci est devenue un vrai fouillis. Comme je me déplace beaucoup, je n’avais pas le temps de m’en occuper et je ne tenais pas de livre de cave. Du coup, parmi les 300 bouteilles que j’avais accumulées, beaucoup étaient fanées. C’était un vrai gâchis. Puis, j’ai vu émerger les sites comme Cavissima, qui proposent de vous épauler dans la constitution et la gestion d’une cave clés en main. J’ai choisi leur offre premium qui consiste à investir 100 euros par mois dans l’achat de grands crus, principalement bourguignons et bordelais. J’ai dû, en prenant en compte quelques versements complémentaires, investir plus de 8000 euros en trois ans. Sur la base de la cote fournie par Cavissima, ma cave se valorise de plus de 10 % par an. Et je n’ai vendu aucune bouteille. Cette solution me permet de concilier plaisir et placement. Si j’ai besoin de cash, alors j’en vendrai.



Clientèle aisée

Pour ceux qui n’ont pas la patience ni les connaissances, il existe des alternatives : les fonds d’investissement et les caves clés en main. Mais prudence… Réservés à une clientèle aisée, les fonds d’investissement sont en majorité anglo-saxons. Ils spéculent pour l’essentiel sur des grands crus de bordeaux, qu’ils stockent dans des zones franches, à Londres et Genève, pour éviter d’acquitter la TVA. Ils prélèvent de 1,5 à 2 % de frais de gestion et 15 % de commissions de performance. Souvent établis dans des paradis fiscaux, ces fonds échappent à tout contrôle. Aujourd’hui, seul Uzès Grands Crus, le fonds de la Financière d’Uzès, fait l’objet d’un agrément de l’Autorité des marchés financiers (lire tableau). « Le visa de l’AMF nous oblige à une totale transparence », confirme Dominique Goirand, PDG de la Financière d’Uzès.

Attention aux dérives

Pour contourner la lourde règlementation sur l’appel public à l’épargne, des sociétés comme Patriwine, Cavissima ou La Bergère ont eu l’idée de commercialiser des caves clés en main. Hélas, ces sociétés spécialisées dans la vente de ces caves personnalisées ne sont soumises à aucun contrôle extérieur, hormis leurs commissaires aux comptes. « Il serait souhaitable qu’un organisme de contrôle officiel règlemente notre activité » admet Thierry Goddet, président de Cavissima.

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Pour le moment, toutes les dérives sont possibles. Jusqu’à juin dernier, la société Patriwine achetait une bonne partie de ses vins auprès d’un négociant qui était aussi l’un de ses actionnaires. Mais les tarifs tellement au-dessus de ses concurrents que Franck Nogues, fondateur de Patriwine, vient de décider de passer par d’autres fournisseurs. « Notre nouveau catalogue, disponible depuis début septembre, est plus compétitif de 10 à 15%. » A l’évidence, cette bonne nouvelle a de quoi agacer les clients qui se sont, eux, constitué une cave Patriwine au prix fort ! 

Ce n’est pas tout. Les vendeurs de caves clés en main comme les fonds d’investissement sont confrontés à deux problèmes majeurs : le risque de valorisation et le risque de liquidité. Aujourd’hui, les professionnels s’appuient sur les estimations réservées aux professionnels de la place de Bordeaux et sur celles établies par trois sources : iDealwine (qui reprend les ventes aux enchères), Winedecider et Liv-ex (qui agrègent les ventes aux enchères et les ventes entre professionnels). Hélas, ces cotes ont leurs limites : hors taxe, le même Château Latour 2009 est ainsi valorisé 1140 euros sur iDealwine et 1468 euros sur Winedecider. Tandis qu’un Haut-Brion 1995 est estimé 396 euros sur Winedecider, contre 295 euros seulement sur iDealwine.

Rendement de 3 à 5 % par an

pic5C’est aussi un marché… peu liquide. Michel Tamisier et Myriam Mascherin, les gestionnaires de Nobles Crus, fonds luxembourgeois créé en novembre 2007, en savent quelque chose. Leur fonds ne peut pas faire face aux désengagements massifs d’investisseurs contraints de sortir pour des raisons réglementaires. Résultat ? Nobles Crus est obligé de se délester de ses vins à des cours inférieurs à ceux retenus pour la valorisation de son portefeuille.

Angélique de Lencquesaing, directrice générale déléguée d’iDealwine, site spécialisé dans la vente de vins aux enchères, est formelle : « Pour espérer être rentable, le placement en bouteilles de vin ne peut s’envisager que sur sept ans minimum. » N’attendez pas des valorisations astronomiques. Pas plus de 3 à 5 % par an sur dix ans. Ce qui est déjà bien. A l’évidence, le placement vin peut offrir de belles opportunités à long terme. Mais il présente aussi des risques et doit donc être consommé – vous connaissez la chanson – avec modération ! Jean-Pierre de La Rocque

Source: Challenges.fr
12 Septembre 2013

 

 

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